Le « Big bang » en un graphique
Je me propose d’évoquer, dans une série de futurs « posts », les évolutions que vont apporter les nTLDs pour le marché des noms de domaine et comment ils pourraient impacter les stratégies des différents acteurs.
Les acteurs du monde des noms de domaine l’attendent depuis plus de cinq ans. Ce « Big-bang » annoncé en fanfare lors de la réunion ICANN de Paris en juin 2008 a commencé il y a quelques jours avec l’introduction dans le système racine des quatre premières « nouvelles extensions » (1). Symboliquement, celles-ci sont des « IDNs-TLDs », c’est-à-dire des extensions en caractères non latins : une en caractères arabes, deux en caractères cyrilliques et une en caractères chinois.
Une petite rétrospective statistique sur l’évolution du nombre d’extensions est possible grâce aux « Fiches IANA » (2), véritables « whois » des extensions. On connaît ainsi, pour chaque extension active, son registre, ses contacts et sa « date de naissance » – le jour où elle a été insérée dans le système « racine » du DNS administré par l’IANA. La fonction IANA a été confiée par le gouvernement américain à l’ICANN à la création de celle-ci en 1998, ce qui explique le rôle incontournable de cette organisation dans la vie du système de nommage.
Le graphique ci-dessous offre une représentation visuelle parlante du passé… et du futur immédiat :
Evolution du nombre cumulé de TLDs par type de TLD et au global
Source : fiches IANA, dates d’insertion dans la racine
On constate tout de suite que les gTLDs (extensions génériques telles que le .COM, .NET etc.) n’ont jusqu’à présent été que peu nombreux en regard des ccTLDs (extensions liées à des territoires). La grande période d’expansion du système de nommage – en nombre de TLDs délégués bien sûr, pas en nombre de noms de domaine déposés – date de la période 1985 – 1997, époque où la fonction IANA était administrée par John Postel.
Un esprit malicieux pourrait remarquer que la courbe a été plutôt plate depuis 1998 – date de la création de l’ICANN. Mais ce phénomène est explicable : les ccTLDs étaient déjà attribués en 1997 et les évolutions ne se produisent plus depuis qu’en nombre marginal, au gré des reconfigurations géopolitiques de la planète. Ainsi de la disparition du .YU (Yougoslavie) au profit des .RS (Serbie), .HR (Croatie), .SI (Slovénie) et .ME (Monténégro). L’ICANN en revanche n’est pas restée inactive sur le front des gTLDs, créant au total 15 gTLDs entre 2001 et 2012, le dernier en date étant le sulfureux .XXX.
Une nouvelle catégorie d’extensions apparaît à partir de 2011 : les « IDN – ccTLDs », soit les variantes des ccTLDs de pays utilisant des graphies non latines : le .РФ russe est certainement le plus célèbre avec ses plus de 700 000 noms déposés, mais il en existe 36 à ce jour, connaissant des fortunes diverses.
Ce qui va changer à partir de la fin 2013, en s’accélérant à partir de 2014, le graphique l’exprime beaucoup mieux qu’un long discours : une explosion du nombre de gTLDs concentrée sur deux à trois ans, tandis que les ccTLDs resteront stables.
Pour spectaculaire qu’elle soit, cette évolution dissimule cependant une réalité plus contrastée. De la même manière que le petit nombre de gTLDs actuels pèse à lui tout seul autant que les 250 ccTLDs, toutes les futures extensions en gestation aujourd’hui ne seront pas de nouveaux .COM. Un grand nombre sont portées par des structures qui les réserveront à leur usage propre ou à une communauté restreinte ; d’autres, les « géo-TLDs » cibleront des zones de chalandise plus larges tout en restant reliées à leur signification géographique ; une forte minorité, quelques centaines, seront vraiment génériques et ouvertes à tous.
Je poursuivrai dans mon prochain post avec les impacts de ces évolutions sur les différents acteurs, et notamment pour les registres et pour les registrars (bureaux d’enregistrement accrédités ICANN).
(1) Internet Expansion Now Underway
http://www.icann.org/en/news/announcements/announcement-3-23oct13-en.htm
http://www.iana.org/domains/root/db