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Lala Andriamampianina nous a quittés

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Le 11/02/2020

Dans la nuit du dimanche au lundi 10 février, Lala s’en est allé. Tout en discrétion, sans faire de bruit, sans prévenir même.

Lala, cette figure de sagesse et de persévérance non seulement de l’internet africain, mais de l’internet tout court, est parti et le vide laissé est aussi immense que l’émotion et la tristesse qui nous étreignent à l’Afnic.

On parle souvent de pionniers de l’internet pour désigner des figures tutélaires, anciennes, présentes depuis les années 90 dans le paysage de l’internet. On en parle encore plus quand il s’agit du continent africain. Peut-être parce que ces personnes, acharnées plus que d’autres à partager avec leurs concitoyens les opportunités de l’internet étaient plus seules, donc plus visibles, que les pionniers d’autres continents. Mais Lala ne venait pas d’un continent.

Il était insulaire. Et ici le mot de pionnier prend encore plus son sens. Car l’œuvre qu’il a accomplie, avec d’autres et je pense notamment à son ami et camarade de toujours Raft Razafindrakoto, est à nulle autre pareille.

Arrimer sa grande île au monde, la tourner vers le continent frère de l’Afrique.

Tout cela pour, en sens inverse, larguer les amarres et permettre à la jeunesse malgache de voguer plus libre, car le savoir libère, plus riche, car la connaissance est un bien précieux, plus confiante et plus fière, car Madagascar a grâce à lui, un autre drapeau, un beau drapeau, le .mg.

Je parle de la jeunesse parce que Lala, professeur, enseignant, avait dédié sa vie à l’éducation et à la transmission des savoirs. Comme l’écrivait hier notre président Godefroy Beauvallet à notre conseil d’administration, dont Lala fut un membre formidable :

« Peut-être que les grands enseignants ne meurent jamais vraiment, puisqu’ils continuent à vivre à travers ceux qu’ils ont formés et qui continuent leur œuvre. Si c’est vrai pour quelqu’un, c’est bien pour Lala. »

Lala fut de ces grands enseignants en effet, j’ai pu m’en rendre compte durant toutes ces années d’échange avec lui. Presque vingt ans que nous nous connaissions, et presque à chaque fois, avec ces dernières années plus d’insistance, il me parlait de la nécessité de trouver et de préparer celles et ceux qu’il appelait « la relève ». Il ne se plaignait pas Lala, sauf quand l’organisation des examens où les conditions de travail des étudiants étaient en jeu. Sauf quand un opérateur télécom ne faisait pas ou mal son travail et coupait la connexion à son université.

Engagé dans les projets de connexion de l’université de Madagascar, à travers le projet i RENALA http://www.irenala.edu.mg, son regard portait toujours plus loin que le déjà vaste horizon de la formation de la jeunesse malgache. Bien sûr, avec NIC-MG http://nic.mg il œuvrait à fournir un service stable et de qualité pour la présence en ligne malgache. Mais tant qu’à faire, puisqu’avec Raft ils avaient essuyé les plâtres en étant parmi les premiers registres africains à s’automatiser, autant traduire l’ensemble des modes d’emplois des logiciels de registre en français, et en faire don à ses homologues francophones. Et tant qu’à faire, puisqu’il avait obtenu le financement pour la mise en place du réseau national malgache pour les universités, avec le concours de ses amis dans le monde entier, et particulièrement, en France, RENATER et l’Afnic, pourquoi ne pas mettre en place un point d’échange malgache, pour économiser la bande passante internationale ? C’est ce qu’il fit dès 2014.

Lala était comme cela. Il partait de son université, et le service qu’il rendait, il désirait le rendre au plus grand nombre, au-delà des campus, au-delà des mers et des continents.

Membre du Collège international de l’Afnic, Lala en fut un pilier, un acteur engagé, un Président visionnaire. Sous son mandat, l’orientation vers la jeunesse du Collège international de l’Afnic s’est confirmée et déployée, avec par exemple l’initiative i2N http://www.i2n.mg. Les travaux sur l’automatisation des registres africains se sont approfondis, permettant à l’Afnic de construire une offre d’accompagnement aujourd’hui unique. La présence africaine francophone s’est renforcée au sein des organismes panafricains de l’internet. AFRINIC https://www.afrinic.net , AfTLD http://www.aftld.org mais également le GAC de l’ICANN https://gac.icann.org ont vu, à divers degrés, un renforcement quantitatif et qualitatif de la présence africaine francophone. Bien sûr, Lala s’appuyait sur ses vieux complices Pierre Ouedraogo, Pierre Dandjinou, Anne-Rachel Inné, Adiel Akplogan, Alain Caristan, Alain Aïna, Alex Corentin, Boubakar Barry, Ahmedou Ould Haouba, Souleymane Oumtanaga qui lui a succédé à la tête du Collège international de l’Afnic, Odile Ambry, Sébastien Bachollet, Emmanuel Adjovi, Laurent Ferrali, et bien sûr, encore et toujours, Raft.

Je ne peux citer ici tous les membres du Collège International de l’Afnic, dont je sais la douleur, mais je veux avoir une pensée pour Serge Sanou, du Burkina-Faso, qui avait, je le sais, lié une relation forte avec Lala, et qui fut le premier à nous avertir de la terrible nouvelle.

Lala fut administrateur de l’Afnic durant plus de six ans. À ce titre, et jusqu’en juin 2019, il a accompagné des changements cruciaux pour notre association et soutenu des projets majeurs. Je me souviens de son enthousiasme au lancement de réussir-en.fr, de sa réflexion sur la nécessité de faire le même travail de conviction et de promotion des extensions nationales partout sur le continent. Et que dire de sa confiance, de ses encouragements, de sa clairvoyance quand l’Afnic s’est lancée dans la refonte complète se son système de registre, d’ailleurs encore en cours. Il voyait à la fois le bénéfice futur pour l’Afnic et le .fr, mais également la nécessité d’en profiter pour offrir une nouvelle solution aux registres africains qui désireraient s’automatiser et se moderniser. Il avait confiance en nos compétences, il nous encourageait, nous soutenait, nous orientait. Il était un administrateur formidable.

À titre plus personnel, je ne peux oublier son aide et sa présence durant la transition qui suivi le départ de Mathieu Weill, en 2017 et qui me conduisit avec sa confiance et celle du conseil d’administration de l’Afnic, à prendre la direction de notre association.

Tant de bienveillance, tant d’encouragements, tant de confiance. Il va falloir donc continuer à avancer sans cela désormais, ou plutôt se souvenir de tout cela, se dire que si tu étais encore parmi nous, tu continuerais à dispenser sans compter à toutes et tous cette confiance que tu avais en nous.

Monsieur Andriamampianina, mon très cher Lala. Pour beaucoup d’entre nous ton nom reste imprononçable. Mais ton prénom est clair, court, joyeux. C’est une musique entrainante, un début de printemps, une promesse, un sourire.

Lala, c’était facile à retenir et toi, tu es impossible à oublier.

Je retiens cela de toi et bien plus, je sais que tant manque désormais à ta famille, à tes proches, à tes amis à qui j’adresse nos pensées collectives. Les salariés de l’Afnic actuels et anciens, dont beaucoup te connaissaient bien et de longue date, les membres de notre association, les anciens membres, les Présidents et les administrateurs qui se sont succédés, les Directeurs généraux qui se sont succédés, toutes et tous te pleurent aujourd’hui, et saluent ta mémoire.

 Photo Lala Andriamampianina