Lors de la dernière réunion de l’ICANN à Copenhague début mars, cette question était au centre de toutes les attentions.
Alors qu’aucune date n’est fixée à ce jour par l’ICANN, les spéculations vont bon train : 2020 ? 2025 ? Quels sont les obstacles susceptibles de retarder cette échéance ?
L’évaluation du premier round n’est pas encore terminée
Pour mémoire, près de 2000 candidatures pour une extension de premier niveau (gTLD) ont été déposées auprès de l’ICANN en 2012. A l’issue de ce processus, plus de 1000 nouvelles extensions ont été créées parmi lesquelles des .marques (.leclerc, .mma) mais également des extensions géographiques (.paris, .bzh) ou génériques.
Il ne pourra y avoir de second round de création de nouvelles extensions tant que les leçons du premier n’auront pas été tirées. Et c’est au groupe de travail « New gTLDs Subsequent Procedures » qu’a été confiée la délicate tâche de procéder à ces évaluations.
Tous les regards sont donc désormais tournés vers ce groupe car l’enjeu est de taille.
A Copenhague, il a pris soin de présenter l’avancée de ses travaux pour informer le plus précisément possible l’ensemble de la communauté impatiente. Et pour ceux qui ne participaient pas aux discussions, le groupe de travail a présenté sa newsletter mensuelle permettant de suivre plus régulièrement les évaluations en cours.
Les évaluations du groupe de travail portent sur des sujets variés : les frais de candidature, la possible accréditation des opérateurs techniques de registre, la clarté et la stabilité des règles d’attribution des extensions ou encore le contrat de registre.
Et c’est le moment ou jamais de donner son avis car l’ICANN invite, jusqu’au 1er mai prochain, toutes les personnes intéressées à commenter le questionnaire du groupe sur l’ensemble de ces sujets.
Mais d’autres thèmes viennent s’ajouter aux discussions du groupe de travail risquant de retarder d’autant plus cette évaluation. C’est le cas de la protection des noms géographiques, un sujet particulièrement sensible qui divise la communauté.
Quelle protection pour les noms géographiques ?
Ce sont les représentants des gouvernements au sein du GAC (Governemental Advisory Committee) qui ont engagé les débats: comment assurer la protection des noms géographiques lors du prochain round ? Le GAC cherche une solution pour éviter de nouveaux conflits comme ceux liés aux candidatures du .amazon ou du .patagonia en 2012.
A cette époque, plusieurs États dont le Brésil et le Pérou avaient alerté l’ICANN d’un risque lié au fait d’accorder à la société Amazon un droit exclusif sur l’extension .amazon. Du point de vue du GAC, cela aurait eu pour effet d’empêcher toute autre utilisation de cette extension à des fins d’intérêt général comme par exemple celui de la protection de la forêt amazonienne.
Le conflit perdure encore aujourd’hui et le GAC envisage un mécanisme qui nécessiterait l’accord préalable des autorités concernées avant l’attribution d’un nom géographique comme extension. Une idée fait son chemin tout en soulevant d’autres questions : proposer une liste exhaustive des noms géographiques opposables aux candidats.
Mais quels noms géographiques seraient visés par ce dispositif ? Ce qui semble évident au premier abord ne l’est pas forcément lorsque l’on creuse la question : un pays, une région ou une ville sont simples à répertorier mais qu’en est-il d’une montagne, d’une rivière ou de n’importe quel autre lieu non indexé dans une liste officielle ? Par ailleurs, comment s’assurer que la liste proposée soit exhaustive ? Doit-on laisser à l’ICANN la responsabilité de la maintenir à jour?
Plusieurs voix s’élèvent d’ores et déjà contre la mise en place d’un tel mécanisme qui tendrait à complexifier la création de nouvelles extensions. Tout le monde à encore à l’esprit l’expérience mitigée de la TMCH et l’idée d’une nouvelle étape de validation est loin de faire l’unanimité.
L’impact de la réglementation européenne sur la protection des données personnelles
Enfin, c’est le fameux RGDP (Règlement Européen des Données Personnelles) qui s’est invité dans les discussions avec son impact sur les activités des registres en Europe.
Les nouveaux gTLDs l’ont d’ailleurs placé en tête de leurs préoccupations dans leurs échanges avec le staff de l’ICANN (lors de la session du tour de table ouverte à tous les registres).
Les registres européens rappellent très justement qu’en l’état actuel, certaines dispositions du contrat de registre pourraient être en contradiction avec la future réglementation européenne.
A titre d’exemple, la publication des données personnelles du titulaire d’un nom de domaine dans le Whois nécessitera le recueil exprès de son consentement sous peine de se voir infliger une amende sévère par les autorités locales de protection des données personnelles.
L’anonymat par défaut de ces données dans le Whois tel qu’appliqué par le .fr depuis presque 10 ans pourrait alors devenir la norme pour tous les gTLDs.
L’ICANN n’a pas encore apporté de réponse à ces préoccupations. Gageons que les discussions qui auront lieu à Johannesburg en juin de cette année contribueront à éclairer ces points.